Le Prix Lew Kopelew pour les militants de la paix a été attribué au Docteur Ammar Zakaria, 33 ans,  anesthésiste, Médecin Chef de l’hôpital M2 d’Alep. Il récompense aussi le travail des médecins de l’intérieur

De gauche à droite, le correspondant de l’ARD Jörg Armbruster, le Dr Ammar Zakaria qui lui a sauvé la vie, Abdul Kader Abdul Rahim un autre médecin d’Alep, Suaad Tayeb, une militante humanitaire syrienne et deux organisateurs du Prix

En avril 2013, l’Allemagne découvre le travail incroyable du Dr Zacaria et de ses collègues d’Alep dans la prise en charge des victimes de guerre. Tout commence lorsque l’envoyé spécial de la chaîne de télévision allemande ARD, Jörg Armbruster est gravement blessé  à l’estomac par un sniper de l’armée. Correspondant pour le moyen-orient, basé au Caire, le journaliste de 65 ans est là avec son équipe pour couvrir les affrontements entre rebelles et l’armée syrienne. Une ambulance amène aussitôt le blessé dans un hôpital souterrain. Le Dr Ammar Zakaria, médecin anesthésiste, dirige alors l’hôpital secret M1 . Il décide une chirurgie sans attendre. Deux chirurgiens vont opérer le journaliste pendant 4 heures. Cette prise en charge immédiate a sauvé la vie de Jörg Armbruster.  Il est envoyé ensuite en unité de soins intensifs pendant 36 h. Pendant ce temps, son équipe loge dans les locaux de l’hôpital . Elle assiste médusée au travail des courageux médecins et personnels de santé de l’hôpital et prend de nombreuses photos. Puis, une ambulance traverse la frontière  avec le correspondant et l’amène jusqu’à Gaziantep en Turquie où un avion spécial affrété par l’Allemagne l’attend pour le ramener chez lui.

Les photos sont diffusées sur ARD dans le cadre du reportage que l’équipe rapporte de son passage à Alep, sans divulguer comme ils l’ont promis le lieu secret de l’emplacement de l’hôpital car les structures de soins sont systématiquement ciblées lors des bombardements. Ces images, les photos du travail à l’hôpital et le récit du sauvetage du journaliste ont un impact très fort en Allemagne. Quatre mois plus tard, l’équipe demande à revenir à Alep pour filmer le quotidien des médecins. Zacaria leur répond qu’il vaut mieux s’en abstenir, la situation devenant particulièrement dangereuse pour les journalistes étrangers.

Entre-temps, une équipe polonaise était venue faire un documentaire sur la ville dans la guerre. Elle a pu opérer dans des conditions de sécurité dont nous ne donnerons pas le détail. Elle a filmé le travail des médecins d’Alep dans sa réalité la plus crue. Comment avec le minimum de moyens en médicaments et en équipements et la pénurie d’électricité, ils soignent et opèrent, sous la menace constante d’être repéré et bombardé. En Pologne, le film a un grand retentissement et suscite beaucoup d’émotion. Avec l’accord des Polonais, le documentaire est transmis à ARD et diffusé sur la chaîne. Il produit là aussi un véritable choc. Les organisateurs du prix Prix Lew Kopelew pour les militants de la paix  avaient déjà eu connaissance du travail de l’équipe du docteur Zacaria par le compte rendu d’ARD suite au sauvetage du journaliste. Le documentaire polonais les décide à attribuer le prix au Médecin Chef. Ils veulent à travers lui récompenser tous ces médecins qui travaillent dans le plus grand secret au péril de leur vie avec une efficacité remarquable. Le prix contribue un peu plus à la renommée du jeune médecin tant en Allemagne qu’en Pologne.

Le 24 novembre, il reçoit son prix à Cologne. Il se rend ensuite en Pologne où il est invité à faire des conférences sur la situation en Syrie. Mais surtout, il a une idée qui lui tient à cœur: “il faut coordonner l’aide humanitaire, dit-il, c’est urgent. Si cette aide n’a pas de cohérence, beaucoup d’énergie est perdue, des  équipements arrivent qu’on ne peut pas toujours utiliser tandis que d’autres terriblement nécessaires manquent”. Il veut profiter de l’élan provoqué par les reportages et amplifié par le prix pour fédérer les solidarités. Cela fait écho à ce que des médecins du Conseil Médical de la Ville d’Alep avait dit en juillet à Paris. (http://www.aavs-asso.org/?p=744). Cette coordination demandée régulièrement par les médecins de l’intérieur n’a jamais vu le jour. Alors, Ammar Zacaria termine son voyage à Paris, siège international de l’OUSSM. Il lui demande de prendre en charge cette coordination. L’UOSSM, finance en grande partie les 4 hôpitaux clandestins d’Alep, M1, M2; M3 et M4. 125 docteurs y travaillent en étroite collaboration pour soigner un flot incessant de blessés. Ce qu’ils ne comprennent pas, c’est pourquoi les associations qui veulent aider les Syriens ne collaborent pas de la même façon entre elles. Elles seraient plus efficaces.

Dr Zakaria à Paris: “Il faut coordonner l’aide humanitaire, c’est urgent.”