"Nous sommes au 21ème siècle, et l'humanité meurt en Syrie. Personne ne peut réellement décrire ce qui se joue ici, c'est juste catastrophique. Les gens sont désemparés, ils se sentent perdus où qu'ils aillent. C'est la misère qui s'abat sur ces camps." Oussama Alhussein, coordinateur médical UOSSM dans le camp d'Atme interviewé par Konbini news.

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Journaliste Konbini : C’est la pire crise humanitaire du XXIe siècle. Au nord de la Syrie, les civils sont pris entre les feux du régime de Bachar el-Assad, soutenu par la Russie, et la riposte turque. Au camp d’Atmeh, juste à la frontière turco-syrienne, des humanitaires nous décrivent leurs conditions de vie, un enfer où des civils meurent tous les jours, des bombes, mais aussi de faim et de froid.

Quelle est la situation humanitaire en ce moment dans la zone ?

Osama Al-Hussein, coordinateur des programmes médicaux et humanitaires de l’UOSSM : Personne ne peut expliquer la situation ici. C’est vraiment catastrophique, c’est terrible, horrible. Les gens sont sans espoir, désemparés. Ils se sentent perdus où qu’ils aillent, donc ils fuient vers le nord-ouest. Avec un peu de chance, ils trouvent de la paix et de la sécurité dans cette zone.

Journaliste : Combien y a-t-il de personnes dans ce camp ?

Osama Al-Hussein : D’après les dernières informations, environ 70 000. Mais je pense qu’il y en a plus de 100 000.

Journalistes : Il y a beaucoup d’enfants ici ?

Osama Al-Hussein : 65% des déplacés ici sont des enfants. Des bébés et des enfants. Si on parle des femmes et des enfants, ils représentent 80% des personnes du camp.

Dr Muhannad Alkhalil, médecin de l’UOSSM : Les déplacés vont de l’enfer, vers l’enfer. De l’enfer de la mort, à l’enfer de la vie. L’enfer de la mort de par la destruction, les bombes. L’enfer de la vie, de par les conditions de vie difficiles. Notamment en ce qui concerne les besoins primaires, la nourriture durant l’hiver. Il y a des veuves, des orphelins…

Osama Al-Hussein : C’est le XXIe siècle, mais dans notre tête et dans notre cœur, on pense qu’il n’y a plus d’humanité malheureusement. L’humanité meurt en Syrie.

Journaliste : Comment faites-vous pour avoir de la nourriture ?

Osama Al-Hussein : L’aide des ONG et des associations locales, ici en Syrie, ça nous aide beaucoup. En cette saison, certaines familles doivent travailler pour un ou deux dollars par jour. Ils envoient leurs enfants, leurs femmes, leurs filles chercher un endroit où vivre. Dans des cultures d’oliviers, par exemple, dans des cultures de raisons, parfois. C’est la misère, ici.

Journaliste : Vous arrivez à soigner les gens ? Vous avez le matériel médical nécessaire ?

Osama Al-Hussein : Ce centre de santé primaire, c’est le premier centre de santé primaire de la zone. Malgré cela, il y a un vrai manque de médecins et d’infirmiers, parce que le nombre d’arrivants ici chaque jour, augmente considérablement, et de manière dramatique.

Journaliste : Des hôpitaux ont aussi été détruits par des bombes, c’est ça ?

Osama Al-Hussein : Oui. Le 25 février dernier, l’hôpital central de la ville d’Idleb a été pris pour cible. Dans la même journée, 10 écoles ont été attaquées, dont deux étaient des maternelles.

Journaliste Konbini : La justification syrienne est souvent de dire que la zone abrite des terroristes.

Osama Al-Hussein : Oui, nous sommes des terroristes [rires]. En politique, vous savez, ils disent souvent autre chose. Ils disent quelque chose, et confirment qu’ils sont des menteurs en même temps. On les a vus attaquer des écoles. Vous pensez que les écoles sont des terroristes ? Si c’est le cas, tout le monde est un terroriste.

Journaliste : Politiquement parlant, qu’est-ce que la France ou l’Europe peuvent faire pour ce conflit ?

Osama Al-Hussein : Pour ceux qui font les lois internationales, ils peuvent soutenir et défendre les Syriens. On a reçu dans notre entrepôt en Syrie, la semaine dernière, un convoi français, qui nous a beaucoup aidés. Il y a un réel manque de médecins et de médicaments, de provisions, de consommables. Ça nous aide, mais ce n’est pas suffisant. On fait appel à tous les convois internationaux, l’argent peut nous soutenir, comme le convoi français.

Merci pour votre soutien. Vous ne pouvez pas imaginer combien on manque de médicaments, d’éducation, ici en Syrie. Les enfants ne vont pas à l’école, car ils sont vraiment pauvres. Ils ne peuvent même pas acheter de cahier pour que les enfants puissent utiliser leurs stylos. De plus, la plupart des écoles travaillent avec des volontaires.

Dr Muhannad Alkhalil : On a besoin de vos prières pour mettre fin à la guerre.